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Enquête

« Les managers ne doivent pas réciter une leçon »

Enquête | publié le : 10.12.2013 | LAURENT GÉRARD

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« Les managers ne doivent pas réciter une leçon »

Crédit photo LAURENT GÉRARD

E & C : Globalement, considérez-vous les résultats de votre étude sur la communication managériale comme positifs ou négatifs ?

G. A. : À la lecture de cette étude, le premier constat général est qu’on assiste à une consolidation et à une intégration de la mission de communication dans les fonctions managériales. Un beau chemin a été parcouru depuis le premier baromètre AFCI-ANDRH-Inergie de 2006, pour installer la communication managériale dans l’agenda des managers.

E & C : Existe-t-il des points négatifs ?

G. A. : Il y a encore des pierres dans notre jardin, qui interpellent aussi nos collègues des RH. Premièrement, les managers réclament des contenus plus pédagogues et diffusés plus en amont. Ces aspects sont notés négativement dans l’étude, et c’est bien que ce soit dit. Pour autant, de gros progrès ont été réalisés. Par exemple, dans le cas de Safran, la société a développé une communication importante sur la vulgarisation économique, la croissance et la mondialisation. Il y a quelques années, les entreprises se disaient : « Ce n’est pas à nous de faire ça ». Maintenant, sous l’effet de la crise, elles ont pris conscience qu’il faut aussi expliquer l’économie et les éléments financiers.

E & C : Les managers insistent aussi sur la qualité de l’information qui leur est transmise.

G. A. : Oui, c’est une deuxième pierre dans notre jardin : l’information aux managers doit leur arriver plus tôt ! L’idéal serait que la communication interne soit présente en comité de direction, ce qui lui donnerait le temps de travailler plus tôt et mieux grâce à cette alimentation en information à la source. La pire crainte des managers est de recevoir l’information en même temps que les autres, et parfois de s’apercevoir que la communication syndicale va plus vite que la communication interne ! Pourtant, parfois, un très bon travail est réalisé par la communication interne et les RH pour un CE, mais il n’est diffusé qu’à un public restreint. C’est dommage ! La complicité de ce binôme est fondamentale pour progresser. Quant à l’impossibilité de communiquer sur des aspects économiques et financiers, du fait de la surveillance des entreprises par l’Autorité des marchés financiers ou sous peine de délit d’entrave : c’est faux. Le travail mené conjointement par l’AFCI et l’Association nationale des directeurs financiers et de contrôle de gestion (DFCG), qui a débouché sur un livre blanc sur la communication interne financière*, montre que c’est tout à fait possible.

E & C : Qu’est-ce qui doit être descendant et montant dans la communication managériale ?

G. A. : C’est un sujet complexe, mais la position de l’AFCI ne se résume pas à “C’est le manager qui informe, après avoir été informé lui-même”. La communication managériale doit être un échange, elle doit porter explications, commentaires, questions et, pour ce faire, il doit y avoir transformation des informations reçues par chaque manager : il ne doit pas simplement diffuser. Nous détestons particulièrement l’idée d’“éléments de langages” avancés par certains. Pour que les managers ne récitent pas une leçon, il faut les autoriser clairement à prendre de la liberté avec le message reçu, à se l’approprier. Le manager doit également pouvoir dire « Je ne sais pas ». Apicil a adopté une pratique qui permet au manager de “mettre une question de son équipe au frigo” avec un engagement de réponse à venir.

E & C : Une des attentes des managers est également de pouvoir s’appuyer sur le caractère exemplaire des leaders.

G. A. : Les managers veulent voir leur patron montrer la voie pour la communication managériale. Avec la crise, cela évolue, et les dirigeants recherchent davantage le contact. On peut citer en exemple la tournée réalisée par les dirigeants de la SNCF, qui ont ainsi rencontré 80 % des salariés pour de vrais échanges, à la suite de la parution de baromètres et d’études montrant de l’inquiétude. Citons également l’exemple du directeur général de Norauto qui a visité 36 lieux en France et rencontré 10 % des salariés pour un contact direct. Il en va de même chez Brico Dépôt.

E & C : Comment expliquez-vous que tant de managers affirment ne pas avoir d’objectifs en matière de communication ?

G. A. : En France, on croit que les managers maîtrisent la communication implicitement, par nature, or c’est faux. La France a encore une vision du manager Superman, c’est une erreur. Le mieux pour évaluer les capacités de communicant d’un manager, c’est de pratiquer des 360°, avec l’appui de la DRH. À ce propos, il est intéressant de voir le taux d’appréciation positive des managers vis-à-vis des communautés de pratique ; c’est le seul outil de l’étude dont le taux d’appréciation est supérieur au taux de pratique ! Il y a vraiment une piste à creuser sur cette entraide entre pairs.

* Lire p. 25.

Auteur

  • LAURENT GÉRARD