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AutricheUNE GARDERIE INTERENTREPRISES POUR RETENIR LA MAIN-D’ŒUVRE

Pratiques | International | publié le : 03.09.2013 | LUC ANDRÉ

Trois grandes entreprises familiales de la région de Linz projettent une solution de garde commune pour les enfants de leurs salariés. Face à un marché de l’emploi en forte tension, l’objectif est de réduire les congés parentaux et de limiter les temps partiels.

En Haute-Autriche, le bastion industriel du nord du pays, les traditions sont bien ancrées. Seul un enfant de moins de 3 ans sur neuf va à la crèche. C’est presque deux fois moins que la moyenne nationale (de 20,8 %). Avec les assistantes maternelles, le taux de garde ne dépasse par 25 %, contre 37 % en France.

Aussi, pour beaucoup de femmes salariées, l’arrivée d’un nouveau-né signifie « un départ en congé parental pour deux ans à deux ans et demi », rapporte Tarek El-Dabbagh, responsable RH du fabricant de lunettes Silhouette. La situation engendre pour les entreprises une perte de savoir-faire et un surcoût pour la recherche d’un ou une remplaçante. Alors, avec deux autres grosses firmes familiales de la région de Linz, Silhouette a lancé l’idée d’une solution de garde interentreprises. « Il y a vingt-cinq ans, nous avions un quota de places en crèche, mais ce n’est plus possible, tout est plein. Et puis, une seule entreprise n’a pas des besoins linéaires. S’associer fait sens pour garantir la fréquentation sur la durée et répartir les coûts », explique Tarek El-Dabbagh.

Un congé parental d’un an

L’idéal pour la firme, qui occupe 800 salariés à Linz, serait d’offrir la possibilité de revenir au bout d’un an et de répartir le travail avec les collègues pendant cette absence, afin de ne pas devoir embaucher. « Nous pourrons aussi intensifier l’utilisation de nos machines », poursuit le responsable de Silhouette, qui se targue d’être le dernier fabricant à produire en Europe.

L’initiative, nommée ÜKiB (überbetriebliche Kinderbetreuung), unique dans le pays, est dans l’air du temps. L’Autriche est déjà confrontée à un manque de main-d’œuvre dans certains secteurs et doit se préparer à un reflux de sa population active à partir de 2017. Dans une étude de 2012, le centre de recherches IBW, fondé par le patronat, tirait la sonnette d’alarme : sans réaction politique pour le contrer, le manque de main-d’œuvre constitue une menace pour la croissance de la prospère Autriche.

Aussi, entre immigration ciblée et réflexion sur le report de l’âge légal de la retraite, la petite république alpine, qui dispose du plus faible taux de chômage de la zone euro, essaye de maximiser son potentiel. Le taux d’emploi des femmes est de 70 %, c’est plus qu’en France, mais près d’une salariée sur deux est à temps partiel. Cette caractéristique est la seconde variable sur laquelle le projet ÜKiB veut peser.

« Si nos collaboratrices savent leurs enfants entre de bonnes mains, elles seront prêtes à allonger les journées de travail et elles seront plus motivées », assure le directeur du fabricant de bonbons PEZ, Hans Bangelmeier. Dans cette entreprise, comme dans la branche production de Silhouette, près de 70 % des salariés sont des femmes.

Renforcer l’attractivité de l’entreprise

Mais l’idée a aussi séduit le concepteur de camions de pompier Rosenbauer, qui compte surtout des hommes parmi ses 1 200 salariés, à Linz. « De plus en plus de jeunes pères partent en congé parental. Et puis, il y a un besoin pour la période d’été, témoigne le responsable RH Andreas Berger. Les communes n’ont pas une offre de garde suffisante. » Comme chez les autres partenaires, il s’agit de renforcer l’attractivité de l’entreprise pour des embauches futures, en offrant des avantages supérieurs à la moyenne. « Le manque de main-d’œuvre ne nous touche pas encore, reconnaît le RRH. Mais nous nous préparons. »

La définition du concept de garde et la coordination du projet, qui devrait concerner une cinquantaine d’enfants au moins, sont assurées par une agence du gouvernement de la province de Haute-Autriche. « Nous nous dirigeons vers un dispositif complémentaire des offres existantes. Le plus important est la flexibilité », explique Andreas Geiblinger, un de ses responsables.

Un plan, qui devrait inclure une participation financière des parents, doit être présenté aux trois entreprises dans le courant de l’automne, pour un déploiement en 2014.

Auteur

  • LUC ANDRÉ