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Des critères réajustés pour ne plus être contestés

Pratiques | RETOUR SUR… | publié le : 25.06.2013 | CATHERINE SANSON-STERN

En janvier 2010, la direction d’Airbus a étendu son système d’évaluation des cadres dirigeants à l’ensemble de ses managers. Certains critères comportementaux ayant été jugés irrecevables par la cour d’appel de Toulouse, saisie par la CGT, la direction du groupe a revu sa copie début 2012.

En réponse à un jugement de la cour d’appel de Toulouse de septembre 2011, la di ? rection d’Airbus a revu certains points de son système d’évaluation des cadres. « Nous avions contesté la partie performance du système P & D (performance & development), utilisée pour mesurer la performance des cadres et leur développement professionnel, raconte Xavier Petrachi, délégué syndical central CGT. À la suite du jugement, Airbus a réduit de six à quatre le nombre de critères correspondant aux valeurs Airbus, abandonnant notamment le critère “agir avec courage”. »

Utilisé initialement pour évaluer ses cadres dirigeants, ce système avait été étendu en janvier 2010 à l’ensemble des cadres, sans consultation préalable du CHS CT. La cour d’appel de Toulouse a demandé au constructeur aéronautique de revoir sa copie, jugeant que, « pour apprécier les aptitudes professionnelles d’un cadre dont l’activité n’est pas toujours quantifiable, des critères reposant sur le comportement [doivent être] exclusivement professionnels et suffisamment précis pour permettre au salarié de l’intégrer dans une activité concrète ».

La cour avait estimé que « la connotation morale de certains comportements issus des valeurs de l’entreprise pouvait rejaillir sur la sphère personnelle », soulignant qu’ils « étaient parfois éloignés de leur finalité consistant à mesurer les aptitudes professionnelles des salariés ».

« Pragmatiques, nous n’avons pas voulu épiloguer et nous avons retravaillé la sémantique, admet Marc Jouenne, DRH France à Airbus. Sur le fond, nous restons persuadés qu’il est capital d’avoir des managers courageux, mais, pour ne pas enflammer davantage les esprits, nous avons supprimé ce critère, précisé les notions trop générales pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté. Dans les exercices d’entretiens annuels formalisés, on ne parle pas seulement de courage, de transparence, mais on donne des exemples de comportements explicites permettant au manager de tenir ses objectifs. Il n’y a plus de contestation du modèle mis en place », se félicite le DRH.

Critères facultatifs

Aujourd’hui, « les critères de comportement ne sont obligatoires que pour les cadres supérieurs III BS et III C. Ils sont facultatifs jusqu’au niveau III B*, et ne peuvent pas dépasser 20 % des objectifs », précise Xavier Petrachi. Le classement des cadres, évalués en trois catégories – top and high performance, meeting expectations et low performance pour lesquels la direction recommandait une répartition-cible de 20 %-70 %-10 % –, a été conservé, le DRH ayant précisé au juge qu’il s’agissait « d’orientations et de recommandations » et non de quotas.

Ce système d’évaluation débouche sur une prime variable représentant 12 % de la masse salariale des cadres ; 7 % sont fixes et donnés en décembre, le reste est distribué en avril, en fonction des performances de l’année n-1. Le budget dédié aux primes étant fixé à l’avance, la direction procède à une “calibration” pour le mettre en cohérence avec les évaluations.

« Si, dans un secteur, il n’y a que d’excellents performeurs, il faudrait donner à tout le monde, or, ce n’est pas possible », remarque Françoise Vallin, déléguée syndicale centrale CFE-CGC, qui reçoit souvent des salariés se comparant à leurs collègues… « Nous procédons à une calibration supérieure avant la notification aux salariés pour vérifier que tout le monde est traité avec justice », répond le DRH.

Par ailleurs, les entretiens annuels doivent désormais être réalisés en face-à-face, dans la langue du cadre évalué. « Comme il y a beaucoup de management transnational, environ un quart des entretiens P & D étaient faits par mail ou par téléphone, affirme Xavier Petrachi. Maintenant, ils sont systématiquement en face-à-face, comme l’a demandé Tom Enders, président d’Airbus jusqu’en 2012 et actuel président exécutif d’EADS. »

Harmonisation

P & D sera-t-il appliqué dans les autres filiales d’EADS comme prévu ? « Il serait intéressant d’élargir le dispositif en le rendant commun à tout EADS », estime Françoise Vallin. « Le système d’évaluation est différent dans ses outils et process au sein d’EADS, à Cassidian, Eurocopter ou Astrium, reconnaît Marc Jouenne. Mais Thierry Baril, DRH d’EADS et d’Airbus, souhaite l’harmoniser dans toutes les divisions. On va mettre en commun et prendre ce qu’il y a de mieux chez chacun. » Pour une harmonisation à l’horizon 2014.

* La grille des ingénieurs et cadres de la métallurgie est divisée en positions : de I et II jusqu’à III A pour les cadres de base ; III B, III BS et III C pour les cadres supérieurs.

ALLIANCE ENTRE LA MÉTHODE SMART ET AIRBUS WAY

En 2010, Airbus a adopté la méthode anglo-saxonne de fixation des objectifs, Smart (spécifiques et contrôlables, mesurables, acceptés, réalistes et ambitieux, temporels), en y couplant le respect de comportements et valeurs de l’entreprise “Airbus Way” (agir avec courage, promouvoir l’innovation et livrer de manière fiable, générer de la valeur pour le client, favoriser le travail d’équipe et l’intégration au niveau mondial, faire face à la réalité et être transparent, développer ses talents et ceux des autres).

L’évaluation de l’entretien individuel est consignée dans l’outil informatique P & D (performance & development). La partie développement intègre les besoins de formation, souhaits en matière de mobilité et d’évolution de carrière.

Auteur

  • CATHERINE SANSON-STERN