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Un guichet unique en Pays de la Loire au service de l’employabilité

Pratiques | publié le : 28.05.2013 | VIOLETTE QUEUNIET

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Un guichet unique en Pays de la Loire au service de l’employabilité

Crédit photo VIOLETTE QUEUNIET

Dans les Pays de la Loire, partenaires sociaux, région et État se sont associés pour créer un guichet unique de cofinancement de la formation des salariés, tous secteurs confondus. Mis en place pour réagir à la crise de 2009, le dispositif s’adresse aujourd’hui aux entreprises qui cherchent à se diversifier et à former leurs salariés à de nouvelles compétences.

Un guichet unique, une instruction rapide, des moyens importants : le dispositif mis en place pour aider les entreprises des Pays de la Loire à financer la formation de leurs salariés cumule les atouts. À l’origine du dispositif : la CFDT qui, fin 2008, estimait qu’il serait intéressant de remplacer une partie du chômage partiel par de la formation. « On a fait également le constat qu’il y avait peu ou pas de formations dans les entreprises, et notamment pas de formations qualifiantes. C’était le moment ou jamais de les mettre en place », indique Jacques Bordron, représentant régional de la CFDT.

Un projet est construit avec d’autres syndicats et les représentants des employeurs (CFTC, CGC, Medef, CGPME, UPA), qui aboutit à la signature d’un accord interprofessionnel régional puis à une “charte de continuité professionnelle des salariés par le développement de la formation”, signée avec l’État et la région en mai 2009 (la CGT et FO l’ont également signée). Le principe : l’État et la région mobilisent des fonds supplémentaires pour cofinancer, avec les Opca, des formations menant à la certification ou à la qualification, à des compétences transférables et à la maîtrise de savoirs de base. Les salariés prioritaires sont ceux de premier niveau de qualification, les salariés des TPE-PME et les seniors. Tous les secteurs sont concernés.

Tous les quinze jours, un comité de financeurs examine les demandes des entreprises à l’aune de ces critères, et accorde les financements. Pour l’entreprise, il n’y a qu’un interlocuteur : l’Opca. « Avec une seule instruction, nous sommes en capacité de mobiliser des fonds qui, hier encore, n’étaient pas les nôtres. C’est ce qui fait l’intérêt de ce dispositif et qui simplifie les choses pour l’entreprise : elle n’a pas à multiplier les demandes de financements, il lui suffit de contacter son Opca », résume Florence André, directrice d’Adefim 44, l’Opca de la métallurgie. Opcalia, Agefos PME, et les Opca du bâtiment ont également participé à la démarche. Dans la période 2009-2010, le gros des financements a été absorbé par les grandes entreprises, notamment STX (chantiers navals), et a profité majoritairement aux salariés en chômage partiel. De l’avis de Florence André, les sommes mobilisées ont « réellement permis de sauver des emplois sur le territoire ».

Volet “offensif”

Depuis 2011, les partenaires ont réorienté la charte, la dotant d’un volet “offensif” pour une durée de trois ans. Cible privilégiée : les entreprises en mutation, qui recherchent une diversification pour ne plus dépendre des mêmes donneurs d’ordre et qui ont besoin de former leurs salariés à de nouvelles compétences. C’est le cas de Babco Industries, une PME de la métallurgie en Loire-Atlantique. À sa création, l’entreprise ne faisait que de la chaudronnerie industrielle. Aujourd’hui, l’industrie ne représente que 5 % de son activité. Elle travaille maintenant pour le bâtiment, le mobilier urbain. Quatre soudeurs ont reçu une formation de 70 heures aboutissant à une qualification soudure particulière, indispensable dans ces secteurs. Par ailleurs, l’entreprise montant en puissance (elle est passée de 2 à 30 salariés en six ans), l’assistante, de niveau bac, se forme en alternance pour acquérir un BTS assistante de gestion PME-PMI. Coût total : 32 267 euros. Seuls 18 % sont restés à la charge de l’entreprise grâce à la charte. « Si le dispositif n’avait pas existé, je n’aurais pu faire que le tiers des formations », estime le dirigeant, Jérôme Ameline Basbourg. La montée en compétences pour s’adapter à de nouveaux marchés n’est pas sa seule motivation : « Former les salariés les valorise, cela fait partie d’une démarche RH. C’est aussi une reconnaissance de leur investissement dans l’entreprise. »

Pas de formation pour les 20 opérateurs de l’équipementier automobile Tristone Flowtech, situé près de Nantes, mais une VAE collective qui a débouché sur un titre d’agent de fabrication industrielle. Cinq autres salariés ont suivi une formation aux savoirs de base : « Cela fait partie de la responsabilité sociale de l’entreprise que de reconnaître les compétences des salariés et de développer leur employabilité », estime Marie-Laure Dion, DRH. 48 % du coût global a été pris en charge par le dispositif de la charte. Selon la DRH, la VAE collective aurait eu lieu sans ce financement, mais se serait sans doute faite au détriment d’autres formations.

Pour les partenaires de la charte, le bilan est plutôt satisfaisant : « Ce dispositif a inversé la tendance : il a bénéficié davantage aux salariés ouvriers et employés qu’aux cadres. Nos représentants dans les entreprises nous disent aussi qu’il a créé une appétence pour la formation chez des salariés qui en bénéficiaient peu », indique Jacques Bordron.

Formation certifiante

Pour que les entreprises bénéficient du dispositif, leurs conseillers Opca ont parfois revu les projets de formation. « Plutôt que de faire de l’adaptation au poste en deux jours, nous leur proposions une formation plus longue et débouchant sur une certification. De ce fait, cela a changé chez certaines entreprises leur vision du plan de formation », relate Florence André. Vice-président du conseil régional, chargé de l’emploi et de la formation professionnelle, Jean-Philippe Magnen parle, à propos du volet offensif, d’un « changement de posture : les entreprises ont intégré une logique de prospective et de prévention ». Le dispositif a, du coup, enclenché des démarches de GPEC de filières (navale, aéronautique, automobile) et territoriales soutenues par les mêmes partenaires. Mais il peut mieux faire – les TPE sont encore trop peu nombreuses à en profiter, les formations aux savoirs de base trop rares – et des réflexions sont en cours sur ces sujets. Le dispositif fait actuellement l’objet d’une évaluation par le Céreq, centrée sur le parcours professionnel des salariés. Le rapport, attendu pour 2014, sera une aide à la décision pour sa pérennisation. Mais il fait d’ores et déjà consensus, et, selon Jean-Philippe Magnen, « il est voué à devenir un dispositif durable ».

L’ESSENTIEL

1 Les partenaires sociaux ligériens se sont accordés sur un dispositif de guichet unique pour la formation des salariés. L’accord a été complété en 2009 d’une charte signée aussi par l’État et la région.

2 L’interlocuteur des entreprises reste leur Opca. L’État et la région peuvent mobiliser des fonds supplémentaires.

3 Après avoir surtout profité aux salariés en chômage partiel des grandes entreprises, le dispositif bénéficie aussi désormais, sur un mode offensif, aux entreprises en transformation. Il devrait être pérennisé.

LA CHARTE D’ENGAGEMENT EN CHIFFRES

Volet “défensif” (2009-2010)

• 145 entreprises ; 5 569 salariés formés ; 872 304 heures.

• Coût : 29,583 millions d’euros, dont 22,5 % État, 13,5 % région, 59 % Opca, 5 % FUP.

Volet « offensif » (2011-2012)*

• 190 entreprises ; 2 578 salariés formés ; 204266 heures.

• Coût : 8,240 millions d’euros, dont 17,4 % État, 16,3 % région, 33,5 % Opca, 11,4 % FPSPP, 21,1 % entreprises, 0,3 % autres.

Source : Comité de pilotage de la charte.

* Chiffres au 30/10/2012.

Auteur

  • VIOLETTE QUEUNIET