Une personne qui prend sa retraite part avec ses connaissances, ses expériences… Pour éviter de perdre ces précieuses compétences, l’avionneur européen Airbus a mis en place depuis 2003 un programme de transfert des savoir-faire, des connaissances et expériences entre entrants et sortants baptisé ExTra, pour Expertise Transfert. « À l’époque, ce programme a été conçu à la demande du bureau d’études, confronté au départ à la retraite des pionniers du groupe, des experts très pointus qui avaient participé aux programmes clés comme ceux du Concorde ou de l’A300… Il nous fallait être réactifs et concevoir un processus de transfert simple et efficace, en s’appuyant sur l’accord explicite des personnes », explique Eva Dauphin, chef de projet, consultante interne Knowledge Management Airbus France. Proposée systématiquement aux salariés d’Airbus France lors d’un départ à la retraite, la convention ExTra peut être également réalisée à la demande du supérieur hiérarchique ou déclenchée dans des cas de mobilité interne ou de changement de situation professionnelle.

Le programme, qui a démarré lentement, connaît depuis 2012 un fort développement. Alors que, jusqu’en 2006, une cinquantaine de conventions ExTra ont été réalisées chaque année, le programme est monté ensuite en puissance et a compté 150 transferts par an, puis 250 à partir de 2008. En 2013, Airbus s’est donné l’objectif ambitieux d’atteindre 350 opérations ExTra. « L’intérêt du programme est maintenant identifié. Après les fonctions techniques du bureau d’études, les fonctions supports telles que RH, achats et finances sont concernées depuis cette année. Le programme est ouvert à tous, y compris aux cols bleus, mais uniquement pour des procédures transférables », précise Eva Dauphin.

Formalisé dans le cadre de l’accord seniors d’Airbus, le programme ExTra est devenu une étape importante en fin de carrière, un moment de “reconnaissance professionnelle” qui a fait ses preuves et qui sera également étendu à d’autres filiales du groupe. Dans des cas de mobilité où le processus n’est pas automatique, le sortant, le nouvel arrivé ou encore le supérieur hiérarchique doivent en faire la demande. « La valeur ajoutée de la démarche est réelle : d’abord pour la personne qui arrive sur le poste, beaucoup mieux formée ; ensuite pour les clients qui ne voient pas de différences dans la qualité, et enfin pour la hiérarchie, dont la mission clé est de sécuriser les compétences des équipes. J’ajoute que la simplicité de la démarche est appréciable pour le manager qui en fait la demande », constate un manager utilisateur du programme en 2012. Depuis 2008, la cote d’ExTra n’a cessé de monter auprès des managers et « son efficacité est plébiscitée parce qu’elle réduit de moitié le précieux temps de transfert de poste », assure Eva Dauphin.

L’organisation d’ExTra, mise en place dès 2003, prévoit un transfert entre entrant et sortant en quatre étapes, orchestré par un consultant interne, garant de la confidentialité des échanges, qui permet une liberté totale de parole. La durée du programme s’adapte aux situations et peut durer de six semaines à deux ans.

Le démarrage scelle l’accord et fixe les objectifs. Le diagnostic est l’étape de la cartographie des connaissances, et définit celles qui seront transférées, ainsi que les méthodes choisies avant d’entrer dans le troisième temps, le transfert proprement dit.

Un bilan clôture ce qui a été fait et permet également d’évaluer le programme ExTra lui-même, plébiscité dans 96 % des cas. Les méthodes du transfert sont très ouvertes et prennent des formes variables, en fonction des situations et des choix des personnes, comme la vidéo, les jeux de rôles, les simulations de situation ou encore des modules de formation.