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Enquête

RESPONSABLES FORMATION LE GRAND MALAISE

Enquête | publié le : 28.05.2013 | LAURENT GÉRARD

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RESPONSABLES FORMATION LE GRAND MALAISE

Crédit photo LAURENT GÉRARD

Quel est l’état d’esprit des responsables formation en entreprise alors que se profile une nouvelle réforme d’ici à la fin de l’année 2013 ? Nous les avons interrogés sur leur situation, leur capacité à digérer les bouleversements incessants résultant des réformes. Comment envisagent-ils leur avenir ? Portrait d’une profession qui doute.

Budgets malmenés par la crise depuis plusieurs années, mise en œuvre de la réforme de 2009 sur la fusion des Opca et réforme Cherpion sur le redimensionnement de la période de professionnalisation… sans oublier une nouvelle réforme qui se profile d’ici à la fin de l’année, annonçant certainement des réductions de financements mutualisés des Opca et du FPSPP : la fonction formation dans les entreprises n’a pas été épargnée depuis quatre ans. Et les responsables formation (RF) ont de quoi être désabusés, pour certains et inquiets, pour beaucoup. Quinze d’entre eux ont répondu aux questions que nous leur avons adressées il y a quelques semaines. Elles portaient sur la fonction et ses problèmes actuels, sur leur ressenti et leur bilan de la réforme de 2009, ainsi que sur leurs souhaits pédagogiques et leurs attentes de réforme.

Demande d’anonymat

Premier constat : beaucoup plus de quinze RF ont été contactés, la très grande majorité n’a pas voulu répondre. Deuxième constat : ceux qui ont répondu ont demandé l’anonymat, sauf deux (nous avons donc anonymisé cette enquête pour éviter de braquer le projecteur sur ces deux témoins). Troisième point : globalement, ce n’est pas le fol enthousiasme, que ce soit à propos de leur présent ou de leur futur. Pour certains, c’est même carrément de la peur. Très minoritaires (deux sur quinze) sont les insouciants totalement confiants en l’avenir de la fonction.

La crise est perturbante, mais l’enchaînement des réformes depuis dix ans (2004, 2009, 2013-2014…) l’est également. Et celle annoncée est, sur le papier, d’envergure. En effet, côté formation, la loi sur la sécurisation est très affirmative : un compte personnel de formation sera créé et remplacera le droit individuel à la formation. En deux temps. Tout d’abord, avant le 1er juillet 2013, une concertation sera engagée entre l’État, les régions et les partenaires sociaux sur sa mise en œuvre. Puis, avant le 1er janvier 2014, les mêmes partenaires sociaux procéderont « aux adaptations nécessaires des stipulations conventionnelles interprofessionnelles ». Parallèlement, le gouvernement présentera un rapport au Parlement sur les modalités de fonctionnement du compte, celles de sa substitution au droit individuel à la formation et sur le transfert intégral au sein du compte des heures acquises au titre du droit individuel à la formation. Objectif : que chaque personne dispose, dès son entrée sur le marché du travail, indépendamment de son statut, d’un compte personnel de formation comptabilisé en heures et mobilisé par la personne lorsqu’elle accède à une formation à titre individuel, qu’elle soit salariée ou demandeuse d’emploi ; un CPF intégralement transférable en cas de changement ou de perte d’emploi et ne pouvant en aucun cas être débité sans l’accord exprès de son titulaire.

Un souhait de simplification

Du point de vue du RF, en plus du DIF, le projet de CPF questionne frontalement l’avenir du CIF, du plan de formation et de l’architecture de financement héritée des lois de 1970. Globalement peu motivés par une nouvelle réforme qui viendrait complexifier un peu plus leur activité, nombreux sont ceux qui prônent une remise à plat simplificatrice du système. « Je crains une accentuation de la complexité, notamment dans les perspectives de partage de financements entre les différents acteurs que sont l’État, les Opca, les régions, confie une responsable formation d’un grand groupe industriel. Mais je suis personnellement convaincue qu’il faut une réforme de la formation, qui aurait pour première vocation de tout remettre à plat et simplifier le système. J’ignore si c’est l’objectif du législateur. » Elle ignore aussi les objectifs des partenaires sociaux, qui sortent avec rancœur de la réforme de 2009, et qui ne sont pas du tout, pour l’heure, d’accord entre eux.

Tentons une prévision qui n’engage que nous : les partenaires sociaux ne respecteront pas la date de fin d’année fixée par le gouvernement, un ANI serait signé début 2014, une loi finalisée à la fin du premier semestre 2014, ce qui correspondrait – et ce ne serait pas une coïncidence – avec la date de révision des contrats d’objectifs et de moyens signés entre Opca et État. La professionnalisation serait réservée aux contrats, les périodes devraient quasiment disparaître, et une partie du 0,9 serait prélevée pour financer le compte personnel de formation. Mais ceci n’est que conjecture, et tout est encore possible.

L’ESSENTIEL

1 La concertation qui débute entre État et partenaires sociaux devrait aboutir au remplacement du DIF par un compte personnel de formation.

2 Cette réforme, qui s’ajoutera à beaucoup d’autres, pose la question du financement des actions de formation dans les entreprises, où les budgets subissent l’impact de la crise.

3 Dans ce contexte difficile, l’heure est à l’inquiétude chez les responsables formation, qui cherchent toujours à mieux cibler les besoins et à développer de nouvelles modalités pédagogiques.

Auteur

  • LAURENT GÉRARD