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RECODE INVENTE L’ENTREPRISE DE RECONVERSION

Pratiques | publié le : 16.04.2013 | STÉPHANIE MAURICE

Le groupe AlterEos, spécialisé dans l’insertion par l’activité économique à Tourcoing, a lancé une nouvelle forme d’entreprise solidaire pour les salariés en passe de perdre leur emploi ou déjà au chômage. Elle les forme en contrats de professionnalisation.

Fondateur d’AlterEos, à Tourcoing – 520 salariés, dont 80 % avec un handicap mental – Hervé Knecht n’a qu’un intérêt : « Développer des solutions d’emploi durable pour les personnes les plus fragiles. » Il a donc créé en 2010 une entreprise de reconversion pour « reprogrammer les personnes ». Recode, spécialisée comme AlterEos dans le back-office téléphonique et la numérisation de documents, propose un encadrement spécifique, avec un agent de maîtrise, deux formateurs et dix tuteurs, et un vrai cadre professionnel pour former des personnes dont la particularité est de devoir changer de métier. Hervé Knecht vise des profils peu qualifiés, issus de l’industrie ou de la VPC, secteurs en forte restructuration dans la région, qu’il s’agit donc de faire passer en douceur du bleu de travail au col blanc.

Se former sur un outil de production

Pour que l’apprentissage se fasse plus facilement, l’entreprise les embauche en contrat de professionnalisation d’un an, et les forme in situ, sur les compétences qu’elle pratique tous les jours. « Se former en travaillant sur un outil de production véritable est un besoin pour les personnes de plus de 40 ans, pour qui retourner à l’école est honteux », souligne la directrice de la Maison de l’emploi de Roubaix, Catherine Dorpe. Il a néanmoins fallu convaincre la Direccte, qui jugeait l’entreprise trop jeune et trop petite pour conclure des contrats de professionnalisation, explique Hervé Knecht. Par ailleurs, la formation d’agent de dématérialisation n’est pas qualifiante, même si elle a été financée par l’Opca Agefos-PME. « Le métier est trop nouveau », plaide le dirigeant.

La sélection des candidats se fait après un test d’aptitude en lien avec la Maison de l’emploi. Mais Hervé Knecht a aussi recruté via d’autres canaux. Annick Legros, DRH de La Redoute, se souvient : « Dans le cadre de notre cellule mobilité, Recode s’est présenté à nos salariés qui souhaitaient changer de métier. Nous trouvions la formation intéressante, avec 16 % de théorique et 84 % de pratique, ce qui est important pour des personnes habituées au concret. » Quatre salariés volontaires, employés dans un service de routage destiné à être externalisé, ont ainsi été mis à disposition chez Recode pour y être reconvertis. Mais seulement deux ont été jusqu’au bout. « Plus on avance dans la formation, plus on voit les contraintes, les changements d’horaires, la concentration demandée », explique Annick Legros.

Outre ces cas particuliers, les profils intérimaires ont souvent été privilégiés. Hervé Knecht a rencontré un écueil pour le recrutement de stagiaires déjà expérimentés : le montant du salaire. « Il est difficile de faire repasser par le smic une personne qui a de l’ancienneté professionnelle. » La collaboration avec La Redoute a permis de contourner la difficulté, puisque la société de VPC assurait le maintien du salaire des employés mis à disposition chez Recode.

Un modèle économique à trouver

Innovante dans tous ses aspects, l’expérimentation de Recode connaît aussi des limites. En effet, l’accompagnement des personnes dans l’emploi stable après le contrat de professionnalisation n’est pas assuré, faute de partenariats trouvés avec d’autres entreprises. « Au bout d’un an, on les a rendus à Pôle Emploi », admet Hervé Knecht. Pour l’instant, deux promotions de dix personnes sont passées par Recode, et l’entreprise s’accorde un temps de réflexion. Car le modèle économique de l’entreprise de reconversion, entre PME classique et organisme de formation, reste aussi à trouver.

Auteur

  • STÉPHANIE MAURICE