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Formalisation des délibérations du CHSCT

Enjeux | LA CHRONIQUE JURIDIQUE D’AVOSIAL | publié le : 09.04.2013 |

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Formalisation des délibérations du CHSCT

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Depuis plusieurs années, le CHSCT monte en puissance. Pour autant, les dispositions législatives encadrant cette institution demeurent pauvres et imprécises. C’est donc au gré de la jurisprudence que son régime s’est peu à peu construit. Or, comme en témoignent deux arrêts des 10 janvier et 21 novembre 2012 de la Cour de cassation, les règles relatives au fonctionnement du CHSCT imposées par la jurisprudence sont de plus en plus contraignantes.

Dans la première espèce, une société de transport express de colis, qui envisageait de modifier ses plannings de travail, a procédé, à cette fin, à l’information et à la consultation du comité d’entreprise après avoir pris soin de consulter le CHSCT. Or, considérant que l’employeur avait transmis un avis irrégulier du CHSCT car pris lors d’un tour de table à la fin de la réunion, le comité d’entreprise a saisi le juge des référés afin de faire constater que, de ce fait, sa propre procédure d’information et de consultation était irrégulière. La Cour de cassation a accueilli cet argument, estimant que « […] l’avis du CHSCT ne peut résulter que d’une décision prise à l’issue d’une délibération collective et non de l’expression d’opinions individuelles de ses membres ».

La pratique du “tour de table” ne permettant plus de recueillir valablement l’avis du CHSCT, deux étapes sont désormais nécessaires pour y parvenir. Dans un premier temps, il faut organiser un débat entre les membres du CHSCT. Ainsi, les différents points de vue pourront se confronter. Puis, à l’issue de cette discussion, il faut organiser un vote. Celui-ci peut alors se faire par le système du bulletin secret ou à main levée, mais, dans tous les cas, les débats doivent être clos préalablement au vote. Ces deux étapes doivent être clairement distinguées. De cette manière seulement, l’avis du CHSCT résultera d’une délibération collective.

Cela vaut également pour les décisions du CHSCT. En effet, dans son arrêt du 21 novembre 2012, la Cour de cassation a précisé que « toutes les décisions du CHSCT doivent être prises à l’issue d’une délibération collective ».

En l’espèce, un grand groupe qui projetait de créer un centre d’expertise avait informé et consulté le comité central d’entreprise à ce sujet, mais pas le comité d’entreprise européen ni les CHSCT concernés. Estimant qu’il ne pouvait se prononcer sans ces consultations préalables, le comité central d’entreprise a saisi le juge des référés aux fins de suspension de la procédure jusqu’à information et consultation valable de ces instances. Le CHSCT est alors intervenu volontairement à l’instance en appel. Le mandat de représentation donné au secrétaire du CHSCT résultait d’une simple lettre signée des membres du CHSCT et remise à son président. La cour d’appel et la Cour de cassation ont considéré qu’un tel mandat était irrégulier, la Cour de cassation insistant à nouveau sur la délibération collective comme condition de validité des décisions du CHSCT.

Toutefois, l’arrêt du 21 novembre 2012 ne doit pas être mal interprété. En effet, la Cour de cassation a précisé dans un arrêt du 15 janvier 2013 qu’en cas de manquement de l’employeur à son obligation de réunir le CHSCT à la demande d’un de ses membres, ces derniers peuvent saisir le juge sans avoir à justifier d’un mandat spécial.

Ainsi, il convient de distinguer les actions intentées pour faire valoir les droits accordés aux CHSCT de celles intentées pour faire valoir les droits accordés à ses membres. Lorsque le Code du travail accorde un droit au CHSCT, comme c’était le cas dans l’arrêt du 21 novembre 2012, le secrétaire du CHSCT doit disposer d’un mandat donné collectivement pour agir en justice, car il agit au nom du CHSCT.

Lorsque le Code du travail accorde un droit aux membres du CHSCT, comme c’était le cas dans l’arrêt du 15 janvier 2013, ces membres agissent en leur nom et n’ont pas à obtenir de mandat pour saisir le juge.

Il ressort ainsi des deux arrêts de 2012 une volonté évidente de la Cour de cassation de formaliser les délibérations du CHSCT par le processus du vote.

Amélie d’Heilly, avocate associée à GLH & Associés, membre d’Avosial, le syndicat des avocats en droit social.