L’exception culturelle française est paradoxalement avide de modèles : modèles japonais, américain, suédois et aujourd’hui allemand. Réputée mondialement pour son originalité, la France semble pourtant envieuse de ce qui peut réussir aux autres pays : en l’occurrence, le dynamisme de l’industrie outre-Rhin, quand notre propre secteur industriel ne cesse de décliner.

Pourtant, pour Guillaume Duval, rédacteur en chef au mensuel Alternatives économiques, le succès commercial des marques allemandes ne tient pas tant à la déréglementation du travail et à la politique antisociale conduite par le socialiste Gerhard Schröder qu’à des paramètres politiques, culturels et sociaux, largement indépendants des plans de rigueur imposés à partir de 1998. Parmi ces facteurs de réussite, on peut noter la forte valorisation sociale du travail industriel, l’importance de la négociation sociale, le pouvoir étendu des représentants salariés, le système de formation et de promotion professionnelle, la décentralisation notamment. Facteurs auxquels s’est ajouté un opportunisme certain qui a permis à l’Allemagne de profiter de la main-d’œuvre à bas coût d’Europe de l’Est et de doper ainsi sa compétitivité au détriment de ses voisins européens.

D’où les limites de l’épure : il est évident que la solution qui consisterait pour les autres pays européens, dont la France, à abaisser drastiquement le coût du travail et donc des revenus des travailleurs pourrait rapidement se révéler un modèle largement contre-productif faute de consommateurs !

Made in Germany : le modèle allemand au-delà des mythes

Guillaume Duval, Seuil, 240 pages, 17 euros.