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Enquête

UN ACCORD PRÉCURSEUR CHEZ LES CONSTRUCTEURS AUTOMOBILES

Enquête | publié le : 19.02.2013 | STÉPHANIE MAURICE

La filiale de PSA, spécialisée dans les véhicules utilitaires, a mis à plat son organisation du travail, avec gel des salaires et flexibilité accrue. En contrepartie, elle s’est engagée à ne pas mettre en place de PSE pendant trois ans.

« Notre existence était clairement menacée. » Pierre Long, le DRH de Sevelnord, filiale de PSA établie à Hordain, près de Valenciennes, en est sûr : la signature, le 28 juillet 2012, du premier accord de compétitivité chez les constructeurs automobiles a sauvé le site pour au moins dix ans. « Nous avons été les cobayes », maugrée pour sa part Ludovic Bouvier, délégué CGT, seul syndicat sur les quatre représentatifs à avoir refusé l’accord. La CGT représente 32 % des salariés, ce qui la place juste derrière le syndicat maison, Spi/GSEA. « C’était du chantage à l’emploi. Avant même de négocier quoi que ce soit, on nous a dit : si vous ne signez pas, vous n’aurez pas le nouveau véhicule. »

L’accord ou le PSE

L’enjeu : le K-zéro, nom de code du nouvel utilitaire de PSA. Franck Bieri, délégué syndical de la CFE-CGC, confirme : « Si on ne signait pas cet accord, c’était le PSE qu’on aurait dû signer. » Mais, pour lui, c’est « un bon compromis. La direction s’est engagée à ce qu’il n’y ait pas de plan social pendant trois ans, la durée de l’accord ». Une contrepartie obtenue par les syndicats face aux efforts demandés aux salariés : gel des salaires et flexibilité accrue. Ludovic Bouvier (CGT) reste sceptique : « Entre le 1er janvier 2008 et le 1er janvier 2012, nous avons perdu 993 CDI sans qu’il y ait de PSE. L’accord ne va pas empêcher que les effectifs baissent. » La direction estime le sureffectif à 130 postes. L’usine emploie 2 400 salariés en CDI. Avec le désengagement annoncé pour 2017 du partenaire historique Fiat, Sevelnord s’est retrouvé dans une situation de grande fragilité. Sa gamme de véhicules était vieillissante.

« Nous n’étions pas l’établissement le plus performant. Nous avions, par exemple, un écart énorme de compétitivité avec l’usine espagnole de Vigo », résume Pierre Long. La direction de Sevelnord a donc recherché un nouvel investisseur pour remplacer Fiat. Ce sera Toyota, dont l’usine d’Onnaing, à 30 km, achètera ses utilitaires chez Sevelnord dès le deuxième semestre 2013. Ce qui fait dire à Ludovic Bouvier que l’accord de compétitivité n’a pas pesé tant que cela dans la balance : « Stratégiquement, Sevelnord est bien placé pour fournir Toyota. »

Quoi qu’il en soit, l’organisation du travail a été remise à plat. « Nous avons mené un travail de recherche, regardé comment étaient organisés les concurrents, Volkswagen ou les usines anglaises », précise le DRH. L’accord de compétitivité a ainsi intégré l’overtime, pratiqué par Toyota : si une chaîne a du retard, les ouvriers devront rester jusqu’à 21 minutes de plus, payées en heures supplémentaires. Le chômage partiel par rotation dans les équipes, que l’usine PSA de Rennes utilise déjà, permet d’adapter les effectifs au carnet de commandes. Par ailleurs, les salariés en horaire de journée voient fondre leurs jours de RTT de 11 à 7, dont trois choisis par la direction. En compensation, ils travaillent 8 minutes de moins par jour. Et interdiction de cumuler les congés : tous sont pris dans l’année.

Enfin, l’accord prévoit trois types de mobilité : intra-site et obligatoire; intra-groupe et prêt de main-d’œuvre vers des entreprises de la région, sur la base du volontariat. Dans trois ans, à la fin de l’accord, tout le monde retourne à la table des négociations. « Au pire, nous revenons à la situation d’avant », précise Pierre Long. Qui espère cependant que les salariés, après avoir pris l’habitude de leurs nouveaux rythmes de travail, ne souhaitent plus en changer.

SEVELNORD

• Activité : fabrication de véhicules utilitaires.

• Effectif : 2 400 salariés.

• Chiffre d’affaires 2012 : 1,03 milliard d’euros.

Auteur

  • STÉPHANIE MAURICE