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Des embauches accompagnées pour être durables

Pratiques | RETOUR SUR… | publié le : 04.09.2012 | VÉRONIQUE VIGNE-LEPAGE

Dans le cadre de sa politique diversité, la Société générale conduit, depuis 2008, l’opération “Coup de pouce à l’insertion”, par laquelle elle recrute en CDI des jeunes pas ou peu qualifiés et résidant en zone urbaine sensible.

« Certains jeunes, ayant pourtant un sens commercial, ne postulent pas chez nous, pensant que la banque n’est pas un secteur pour eux. » C’est à partir de ce constat, dressé par Christelle Tavares, chargée de mission diversité, que la Société générale a lancé, en 2008, une opération baptisée “Coup de pouce à l’insertion”, adaptation maison de “100 chances, 100 emplois” dans laquelle elle s’implique au côté d’autres entreprises.

« Préserver la culture de l’ascenseur social »

Lancée à Lyon, puis étendue à l’Île-de-France en 2009 et à Lille et Marseille en 2010, elle vise des jeunes de 18 à 26 ans, résidant dans les zones urbaines sensibles et n’ayant pas ou peu de formation (depuis aucun diplôme jusqu’à bac + 1). « Recrutant habituellement des titulaires d’un bac + 2, nous nous sommes interrogés sur la pertinence du critère diplôme vis-à-vis de la diversité », explique Christelle Tavares. « Même certains bacheliers avec expérience commerciale, auprès de qui nous élargissons notre recrutement, s’excluent d’eux-mêmes », ajoute Fanny Perraudin, DRH adjointe de la banque de détail.

Pour « préserver la culture de l’ascenseur social » et diversifier les effectifs, il fallait se rapprocher de ces jeunes. Dans chacune des villes concernées, c’est la mission locale (ou la maison de l’emploi, à Lille) qui est chargée de les repérer. « Le seul prérequis est qu’ils aient une appétence pour le commerce, voire une petite expérience dans ce domaine, commente Richard Pellet, chargé de l’emploi et des relations entreprises à la mission locale de Lyon. Mais ils doivent aussi avoir le potentiel pour suivre éventuellement un an de formation à la banque. » Accompagnant ces jeunes en matière d’emploi, de logement, de santé, etc., leurs référents en mission locale sont aptes à déceler ce potentiel.

Travailler sur les motivations

Le dispositif, qui vise in fine une insertion durable en CDI, prévoit tout un processus de sélection. Ainsi, les CV des jeunes repérés sont transmis à l’entreprise, qui les invite à une réunion d’information collective. À l’issue de laquelle les candidats intéressés par les métiers proposés (conseiller d’accueil et, à Lille, conseiller multimédia) suivent, par groupes de 15, quatre jours de “sas coaching” assurés par Adecco Formation. « Il s’agit de travailler sur leurs motivations et leur confiance en eux », explique Christelle Tavares, ainsi que de leur apprendre à valoriser leurs expériences. Une approche qui utilise les outils spécifiques du coaching, ceux du théâtre, de la danse et du chant, « plus pointue que ce que l’on fait généralement à la mission locale », admet Richard Pellet, qui assiste au “sas”, puis à son debriefing. Celui-ci permet de repérer ceux qui sont prêts à être présentés à l’entreprise, la semaine suivante, pour un entretien de recrutement, des tests écrits et des mises en situation commerciales étalonnés un peu plus bas qu’habituellement.

Pédagogie dynamique et pratique

Les jeunes sélectionnés signent un contrat de professionnalisation d’un an, financé comme tout contrat en alternance par l’Opcabaia (Opca de la banque et de l’assurance). Une semaine par mois, ils suivent par groupes de 12 la formation du centre de formation de la profession bancaire (CFPB), validée par un certificat professionnel : commerce, connaissance du monde économique, risques, aspects juridiques, fonctions d’une banque, produits et comptabilité. « Comme ils ont perdu l’habitude d’assister à des cours, la pédagogie est rendue plus dynamique et pratique », explique Patrick Tobaldi, gestionnaire RH à la délégation Rhône-Alpes.

Le reste du temps, ils sont affectés dans une agence commerciale volontaire, où ils sont accompagnés par un tuteur formé et sensibilisé aux codes et à la culture des jeunes des quartiers sensibles (par Nes & Cité). Cette formation des tuteurs (1 100 euros par groupe), ainsi que le “sas coaching” (6 000 euros par groupe) sont financés par le budget diversité de la Société générale.

Tout au long du processus, les jeunes sont accompagnés par leur référent de la mission locale, en complément éventuel de l’assistante sociale de l’entreprise. « Certains sont perdus face aux changements que ce contrat induit dans leur vie, commente Patrick Tobaldi. Quelques-uns changent de logement et de fréquentations, d’autres sont en difficulté avec leur famille, parfois peu favorable à un travail dans la banque. » Pour Richard Pellet, « les problèmes à gérer relèvent surtout de difficultés comportementales ». Ainsi, les jeunes ne sont finalement recrutés en CDI que s’ils ont réussi leur certificat professionnel, mais aussi si l’évaluation de leur adaptation en agence est positive.

68 % d’insertion durable

Depuis 2008, 12 promotions ont été conduites à terme (d’autres sont en cours). Sur 218 jeunes entrés en “sas coaching”, 76 avaient signé un contrat de professionnalisation, 53 ont obtenu la certification et 36 ont signé un CDI, « soit 68 % d’insertions durables, note Fanny Perraudin, même si l’essentiel n’est pas de “faire du chiffre”, mais de bien faire ». Elle se félicite que les plus anciennes de ces recrues soient toujours dans l’effectif et, pour certaines, engagées dans une formation continue diplômante leur permettant d’évoluer. « Ce sont des salariés très fidèles et reconnaissants », ajoute-t-elle.

Quant aux “recalés” à une étape ou à une autre, ils sont repris en charge par leur référent de la mission locale. « Parmi eux, certains, qui avaient réussi leur certificat professionnel, ont été recrutés par la Banque postale ou HSBC », assure Christelle Tavares.

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  • VÉRONIQUE VIGNE-LEPAGE