À première vue, la définition de la santé comme de la maladie serait l’apanage du corps médical. Or, selon les auteurs, cette vision est trop superficielle et parfois erronée. À travers le parcours difficile de reconnaissance des maladies professionnelles comme les TMS, la silicose des mineurs ou encore les maladies de l’amiante, les auteurs de ce livre collectif – historiens, sociologues, économistes, ergonomes, psychologues – nous expliquent, au contraire, l’émergence historique de certaines pathologies et l’enjeu que cette reconnaissance représente pour les travailleurs et leurs employeurs. Et qui dit enjeu dit débat. Il est donc question bien entendu de responsabilité par rapport aux risques que l’activité professionnelle fait peser sur la santé des salariés, mais aussi, plus étonnamment, de représentations du travail et plus précisément de représentations de la “valeur travail”. Dès lors que le travail est conçu peu ou prou comme souffrance, le risque qu’il fait peser sur la santé tend à être minoré, y compris par les travailleurs eux-mêmes. Paradoxalement, si la question des pathologies liées au travail, et notamment la prise en compte des risques psychosociaux, suscite aujourd’hui un regain d’intérêt, c’est à la fois parce que le néolibéralisme s’accompagne d’une intensification de la pression au rendement dans de nombreux secteurs mais aussi parce que cette fameuse “valeur travail” tend à dissocier le lien historique du travail et de la souffrance. Le travail comme dimension de réalisation sociale des individus entre aujourd’hui en tension avec le produit travail que l’employeur a tout intérêt à négocier au moindre coût.

Risques du travail, la santé négociée Sous la direction de Catherine Courtet et de Michel Gollac, La Découverte, 324 pages, 29 euros.