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Enquête

ENTRETIEN DE MI-CARRIÈRE : LES CONDITIONS DU SUCCÈS

Enquête | publié le : 07.02.2012 | C. F.

Pour construire une politique senior, « commencer par l’entretien de seconde partie de carrière n’est pas simple, mais c’est la première pierre », relève Alexia Develay, d’Opcalia Rhône-Alpes. Il permet de recueillir des informations et de faire un diagnostic des difficultés des salariés âgés. « C’est un travail essentiel, si on veut proposer des solutions qui correspondent à leurs aspirations. Il permet aussi, tous les cinq ans, de faire connaître les engagements qu’on a pris en faveur des seniors », ajoute-t-elle. Opcalia Rhône-Alpes a mis au point quelques stratégies pour faciliter la mise en place de l’entretien. « C’est à la DRH de l’organiser, parce qu’elle connaît la stratégie de l’entreprise, même si on peut éventuellement y associer le manager. » Autre recette : le regrouper avec d’autres entretiens professionnels. « Créer un nouveau rendez-vous est chronophage et redondant. Ce rendez-vous peut tout à fait prendre la suite de l’entretien sur la formation. »

Certaines entreprises ont préféré regrouper l’entretien de seconde partie de carrière et celui d’évaluation, comme la Biscuiterie de l’Abbaye (230 salariés), à Lyon. « Il ne s’agit pas de juger le salarié mais de l’informer des possibilités prévues par notre accord senior, explique Yannick Le Seac’h, directeur technique. Après ses 50 ans, nous lui proposons par exemple un DIF tuteur. Il prépare ceux qui le souhaitent à transmettre des savoirs aux apprentis que nous embauchons. Les salariés ont trois mois dégagés pour conduire ce tutorat. » Après 55 ans, âge où la fatigue professionnelle peut se révéler, la biscuiterie propose aussi des aménagements de temps de travail, en partie financés par l’entreprise. Pour Yannick Le Seac’h, « cette rencontre en face à face permet de discuter de l’évolution de carrière de chacun. C’est un moment privilégié. La discussion est ouverte. Nous comprenons aussi que les désirs d’évolution de certains salariés soient en contradiction avec nos besoins. D’ailleurs, nous n’hésitons pas à dire à certains d’aller chercher ailleurs s’ils ne peuvent pas évoluer chez nous. »

Pour faciliter l’expression des salariés, certains employeurs font le choix d’un prestataire extérieur. Cyrille Pelegrin, directeur général d’Add’if, constate que cela assure au salarié, dans un premier temps, « un vrai moment d’échanges où il peut se sentir valorisé ». Ensuite, vient l’étape plus délicate où le consultant transmet au salarié la réponse de la DRH. « La qualité de la réponse dépend des marges de manœuvre de l’entreprise. Et toutes n’ont pas les mêmes possibilités. On sera donc, selon les cas, porteur de bonnes ou de mauvaises nouvelles. » L’entretien présente l’avantage, en tout état de cause, « de mettre en adéquation les besoins de l’entreprise avec les souhaits des salariés ».

Florence Sequalino, consultante senior chez Horemis, précise que « l’entretien organisé à l’extérieur de l’entreprise est conçu comme une démarche personnelle du salarié, qui se met en perspective d’employabilité active. Il reçoit d’ailleurs une fiche de liaison qu’il sera libre de communiquer ou non à son DRH et à son manager ».

Se projeter dans l’avenir

Pour la consultante, l’entretien, qui doit permettre aux salariés de se projeter sur le long terme, est un instrument de remotivation. « Il déclenche des souhaits de formation dans 50 % des cas, des envies de mobilité dans l’entreprise, mais aussi parfois à l’extérieur, en libéral », ajoute-t-elle. Elle constate enfin que l’organisation de cet entretien oblige le top management à s’interroger sur ses stratégies futures et à se projeter dans l’avenir. « Lorsqu’il réalise cet effort, c’est très positif, car cela engage l’ensemble des salariés dans un projet collectif », conclut-elle.

Nicole Raoult, consultante spécialisée dans l’emploi des seniors et dirigeante du cabinet Maturescence, invite à innover : « La loi a laissé des marges de manœuvre. On pourrait par exemple imaginer des rendez-vous collectifs interentreprises, où des salariés de différentes sociétés dialogueraient et partageraient leurs expériences. C’est parfois très intéressant de voir ce qui se fait chez le voisin. »

Sociologue du travail, Serge Guérin estime que, pour réussir ce rendez-vous, le management devra opérer un changement radical de point de vue : « Il faut arrêter de considérer le salarié uniquement comme un coût, de l’infantiliser et de le juger. Cet entretien doit permettre de lui donner un peu d’attention et de bienveillance, de valoriser ce qu’il apporte par son travail et de s’enquérir de ses projets, de ses attentes et de son relationnel. »

Auteur

  • C. F.