L’entreprise branchée serait aujourd’hui sans frontière, globale, désétatisée comme les élites, elles-mêmes devenues citoyennes du monde. Ce discours technophile ne correspond pourtant ni à la logique actuelle d’hypercentralisation des capitaux, ni à la composition des conseils d’administration constitués de dirigeants résidents, conséquence logique de la domination des investisseurs individuels et institutionnels locaux.

Les entreprises phares du secteur de l’industrie des réseaux (TIC, audiovisuel, nouveaux médias) se distinguent bien des entreprises traditionnelles par leur zone d’implantation (le monde est devenu effectivement un marché), mais elles restent tributaires d’un modèle unique de gouvernance corporate avec des dirigeants nationaux, des conseillers étrangers consolidant les liens géostratégiques traditionnels, des relations privilégiées tissées avec les sphères politique et publique.

Les multinationales de la communication n’existent donc pas, la dérégulation n’ayant pas abouti à la transnationalisation des capitaux. Les réseaux numériques n’ont pas fait disparaître le vieux capitalisme, n’entraînant la dilution ni des notions de propriété ni celle de classes sociales ni même de souveraineté. Selon Geoffrey Geuens, maître de conférences au département des arts et des sciences de la communication de l’université de Liège, la nouvelle économie n’a, au fond, pas grand-chose de nouveau si ce n’est son habillage idéologique.

Les Vieilles élites de la nouvelle économie

Geoffrey Geuens, PUF, 206 pages, 16 euros.