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Conduire à l’échec, c’est facile

Enjeux | Chronique de Meryem Le Saget | publié le : 19.10.2010 |

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Conduire à l’échec, c’est facile

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Certains managers parviennent à obtenir le pire de leurs collaborateurs. Décrypter leur savoir-faire est aussi instructif que d’analyser les qualités de leadership. Leçon spéciale sur l’art de mener à l’échec.

Pour commencer, il est important de ne pas donner d’horizon. Donc, ne jamais parler du long terme, ne pas partager sa vision au-delà de l’année. Prétexter que le collaborateur n’en a pas besoin pour accomplir sa mission et le maintenir focalisé sur ses objectifs opérationnels. A ce régime, un bon contributeur devient progressivement un simple exécutant, puis un collaborateur peu motivé et traînant les pieds.

Mais il y a pire. Par exemple, ne dire les choses qu’une fois et penser que c’est suffisant. Combien de fois ai-je entendu des responsables me dire : « Ça, je l’ai déjà dit ». Mais certains collaborateurs n’écoutent peut-être pas au moment où l’on parle, d’autres écoutent d’une oreille mais ne comprennent pas – ou ne retiennent pas – sans compter, bien sûr, les absents ce jour-là. Ne dire les choses qu’une fois et espérer être entendu, c’est croire au père Noël et cela conduit tout droit une équipe à l’échec.

Qu’inventer encore ? Faire la plupart de ses échanges par mails, y compris à destination des personnes du bureau d’à côté, et penser communiquer de façon efficace. Bingo ! Même si l’on est un expert respecté, on apparaîtra distant, inaccessible et péremptoire. Bien sûr, les écrits sont utiles car ils restent, mais certains échanges délicats comme ceux concernant des remarques négatives ou des désaccords ne doivent pas être faits par écrit, c’est trop violent pour le récepteur. De plus, seule une conversation directe est porteuse de proximité, d’encouragements et de souffle, les trois ingrédients qui stimulent la motivation. Désolée pour tous les fans de l’écrit qui se croient rigoureux et fiables, c’est la chaleur humaine qui transmet le mieux les messages.

Autre recette facile pour conduire à l’échec. Ne pas expliciter ce que l’on attend et réprimander les personnes quand elles ne font pas ce que l’on souhaite. Nul n’est devin, les collaborateurs ne sont pas censés savoir lire dans les pensées de leur manager. Pour tous les projets, il faut donc préciser ce que l’on attend de chacun et avec quel niveau de qualité. Laisseriez-vous des ouvriers transformer votre maison sans leur donner de plan ni leur préciser ce que vous voulez ?

La liste des conseils implacables se poursuit. Ne pas tenir ses collaborateurs redevables de leurs engagements. Délaisser le suivi des décisions derrière les réunions, en pensant que chacun sait bien ce qu’il a à faire. En fait, on passe tout simplement le message que ce n’est pas grave si l’on ne fait rien, puisque les décisions ne sont pas suivies. Par faute de méthode, certaines équipes deviennent ainsi expertes en lancements de projets, mais n’en terminent aucun.

Enfin, l’arme ultime, simple comme bonjour et très destructrice. Changer d’objectifs fréquemment, sans jamais le dire officiellement. Laisser les personnes découvrir par elles-mêmes, à travers les contrariétés et agacements de leur manager, que les priorités ont changé et qu’elles avancent donc dans la mauvaise direction. Démotivation assurée et performance lamentable à la clé !

Je m’interroge : ces exemples ne sont-ils vraiment que des caricatures ? Ou bien cela ne nous arrive-t-il pas aussi de tomber parfois dans ces pièges ?

Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris. <www.lesaget.com>