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Les pratiques

Des budgets d’expatriation revus à la baisse

Les pratiques | Retour sur… | publié le : 06.07.2010 | AURORE DOHY

Recours accru aux contrats locaux, optimisation des packages, “commuting” : la crise économique a poussé les entreprises à tailler dans les frais liés à l’expatriation.

Quel impact la crise économique a-t-elle eu sur les politiques d’expatriation des sociétés françaises ? Réunis à Paris le 10 juin à l’occasion des 3es Rencontres de la mobilité internationale, responsables rémunération et autres “comp & ben” ont témoigné des orientations prises par leur entreprise au cours des derniers mois. Contrats locaux, optimisation des packages, “commuting” : la conjoncture défavorable n’a finalement fait qu’intensifier le recours à des recettes déjà bien connues.

Des temps de mission réadaptés

Chez Faurecia, la politique d’austérité s’est d’abord traduite par une diminution du nombre d’expatriés. De 230 en janvier 2009, il n’étaient plus que 175 un an plus tard, soit un quart de moins. « Le surcoût d’une expatriation est de 400 000 euros environ par rapport à un contrat local, explique Bérengère de Lestapis, vice-présidente compensation & benefits de l’équipementier automobile. Certaines missions ont été écourtées, d’autres au contraire prolongées afin d’éviter les frais liés au retour et au remplacement. »

Chez le chimiste Rhodia, la maîtrise des coûts est également synonyme de recours accru aux contrats locaux. « Notre nombre d’expatriés est stable, alors même que nos besoins augmentent, en particulier en Chine et au Brésil, précise Bertrand Leroux, responsable rémunérations et avantages sociaux du groupe. Nous compensons en embauchant des salariés sur place. »

Autorisation préalable

De façon générale, les entreprises reconnaissent réfléchir désormais plutôt trois fois qu’une avant d’entreprendre une expatriation. « Notre circuit de décision a largement été revu, explique Tristan Lormeau, le directeur politique et systèmes de rémunération chez Renault. Le nouveau workflow ne peut plus être ouvert que par un des 30 gestionnaires de carrière du groupe et intègre à la fois le patron du métier et le patron de la région d’accueil, qui juge ainsi lui-même si le jeu en vaut la chandelle. »

En 2009, le groupe automobile s’est donné pour objectif de réduire de 25 % un budget expatriation de 300 millions d’euros. Chez Faurecia non plus, aucune expatriation n’est désormais décidée sans une autorisation préalable sur la base du coût.

Des restrictions aux effets pervers

« Attention, prévient de son côté Tammy Moulin, directrice compensation & benefits du groupe Carrefour. L’envoi en expatriation répond parfois à un besoin urgent. Si nous voulons rester suffisamment attractifs, le critère coût doit pouvoir être minimisé. » Les restrictions budgétaires à tous crins ont, en effet, leurs effets pervers. Après avoir envisagé de réduire le budget école, Faurecia a ainsi fait machine arrière. « Le sujet “avenir des enfants” est beaucoup trop sensible », reconnaît Bérangère de Lestapis.

Coup de frein également chez Renault qui avait décidé d’étendre son package intrarégion – alignement des conditions de départ dans des pays d’un niveau de développement similaire – à des pays comme la Roumanie ou le Maroc. Les expatriés concernés ont vivement protesté.

« Lorsqu’il s’agit de réduire les packages, nous sommes très vigilants, souligne pour sa part Brigitte Poincloux, vice-présidente compensation & benefits du groupe Alstom. Deux mille expatriés travaillent actuellement sur des chantiers avec pour motivation le petit pécule qu’ils vont pouvoir amasser. Il est impossible d’y toucher. »

A défaut de se risquer à revenir sur des “acquis”, certaines sociétés préfèrent se tourner vers des modalités d’expatriation plus innovantes. Ainsi en est-il du commuting – le salarié rentre chez lui tous les week-ends – qui remporte les faveurs d’entreprises comme Renault, Air Liquide ou Alstom, tout en restant réservé à des régions relativement proches.

Jeunes professionnels sous contrat local

Les formules réservées aux jeunes professionnels qu’on envoie à l’étranger sous contrat local mais avec un certain nombre d’avantages (protection sociale, primes) gagnent également du terrain. « Il n’y avait auparavant aucune différence de traitement entre un nouvel embauché envoyé à l’étranger et un cadre ayant effectué toute sa carrière dans le groupe, explique Crystel Rostang, responsable rémunération des cadres dirigeants chez Air Liquide. Désormais, les coûts sont pensés en fonction du profil de l’expatrié. » Au risque de voir se développer une expatriation à deux vitesses ? « Cette nouvelle forme d’expatriation avec un package light est conçue comme une opportunité de développement de carrière pour des jeunes chez qui nous souhaitons développer un esprit mobilité, répond Tammy Moulin. Son objectif est très éloigné de celui de l’expatriation “classique” qui répond, elle, à un besoin d’expertise de la part de l’entreprise. »

Auteur

  • AURORE DOHY